Actualités de la Justice Pénale Juin / Juillet 2012

Vendredi 6 Juillet 2012

Actualités de la Justice Pénale Juin / Juillet 2012



REFORME DE LA JUSTICE PENALE, MESURES IMPERATIVES IMMEDIATES ET TRAVAUX D'ENSEMBLE

A la suite de l’article dans le Parisien ci-après reproduit, il nous est apparu opportun de faire les remarques et propositions suivantes :

Quel constat faites-vous de la justice en France ? CHRISTIANE TAUBIRA. C’est un grand service public abîmé. Les gouvernements précédents ont empilé les textes de loi sans aucun souci de cohérence. Ils ont stigmatisé les jeunes, soi-disant responsables de tous les maux. Ils s’en sont aussi pris aux magistrats, taxés de laxisme. Les chiffres montrent que c’est faux : en dix ans, le nombre de peines de prison ferme a augmenté de 16%, et leur durée moyenne est passée de huit à dix mois.

Quels principes guideront votre action ? L’efficacité. Il faut mettre fin à l’inflation législative. Je veux travailler dans le sens d’une justice plus cohérente, plus lisible. Mon approche n’est pas idéologique : les mesures seront ajustées en fonction des remontées du terrain. Ce qui fonctionne sera maintenu et ce qui doit être amélioré le sera. Je souhaite aussi et surtout une justice plus proche des citoyens.

VP : Si les gouvernements précédents ont empilé les textes de lois, il est souhaitable, dans le temps du mandat présidentiel de procéder à un audit du Code pénal et du Code de procédure pénale pour préparer dans un deuxième temps une réforme complète des textes afin de les harmoniser avec les règles issues de la Convention européenne des droits de l’homme et la Charte européenne des droits fondamentaux sans oublier la directive du 1er juin 2012.


Comment y parvenir ? Il faut aller vers plus de simplicité. Nous avons par exemple l’intention de permettre les actions de groupe (NDLR : aussi appelées class actions) : cette procédure autorise les actions en justice à plusieurs pour que la réparation de petits litiges soit effective. Nous avons aussi engagé une réflexion sur les compétences des juridictions, notamment celles qui s’occupent des affaires sociales. Il y a beaucoup d’interlocuteurs différents, peut-être trop. Nous sommes conscients du frein que peut représenter la taxe de 35 € obligatoire pour les procédures civiles, qui a restreint l’accès à la justice. Nous étudions des solutions alternatives de financement car cette taxe alimente le budget de l’aide juridictionnelle.

VP : En ce qui concerne d’une part les « Class actions », il ne faudrait pas par là accroitre encore ce que j’appelle la « victimophilie » du procès-pénal en permettant aux victimes de s’allier sur des préjudices analogues mais qui ne répondraient pas au préjudice direct et personnel de l’article 2 du Code de procédure pénale.
En ce qui concerne d’autre part la taxe de 35 €, elle ne touche que très peu le droit pénal (la saisine de la CIVI n’est par exemple pas concernée)


Votre décision de supprimer les tribunaux correctionnels pour mineurs a provoqué un tollé à droite…
Il ne faut pas faire de ces tribunaux un emblème. Ils ont été créés il y a moins d’un an, et seules 65 affaires y ont été jugées. Les peines prononcées ont été équivalentes, voire plus clémentes que dans un tribunal pour enfants « classique ». En revanche, ils ont désorganisé le fonctionnement des juridictions. Là encore, ma démarche n’est pas idéologique, mais purement pragmatique.

Faut-il revoir l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs ? Ce texte a été réformé 23 fois depuis son adoption. Je veux rester fidèle à son principe fondamental : il n’y a pas de refus de la sanction mais elle doit avoir un objectif éducatif. Cela passe par davantage d’éducateurs. Trop de postes ont été supprimés depuis cinq ans. Pour moi, les effectifs d’éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse sont une priorité absolue. Il faut aussi raccourcir les délais de jugement, car, à ces âges, le risque de récidive rapide est grand. Enfin, le juge doit disposer d’un plus large éventail de réponses à apporter en fonction du parcours et de la situation du mineur. La prison doit rester une option, mais elle favorise la récidive. En milieu ouvert, le taux de non-récidive est de 80%.

Là aussi il y a lieu de mener une réflexion avec les groupes de défense des mineurs des différents barreaux dont nombre d’avocats membres des UJA font partie. Je suis idéologiquement favorable à une harmonisation des règles de procédure et des juridictions de jugement tout en permettant une application différentes des peines.

La promesse de François Hollande de supprimer les peines planchers sera-t-elle tenue ? Bien sûr. Il n’y a aucune ambiguïté. Cette réforme législative trouvera sa place dans le calendrier gouvernemental. Les peines planchers partent du principe que la prison est un outil antirécidive. C’est faux : dans les cinq ans qui suivent un jugement, ceux qui étaient incarcérés récidivent dans 63% des cas, contre 39% pour ceux en liberté conditionnelle. Le tout-carcéral ne marche pas. Il faut développer les alternatives à la prison, comme les peines de probation, le bracelet électronique ou les travaux d’intérêt général. C’est ce qu’ont fait beaucoup de nos voisins européens, avec succès. De cette manière, on lutte à la fois contre la surpopulation carcérale et le risque de récidive. Cela étant, lorsqu’une peine de prison s’impose, elle doit être prononcée.

VP : Sur les peines plancher, mon avis est très partagé puisqu’à Aix en Provence, le Tribunal correctionnel ne les appliques que pour les multi récidivistes, en revanche la Cour (notamment la 13 ème chambre correctionnelle) en fait une application quasiment automatique. Le plancher serait défendable à condition que la juridiction de jugement puisse avoir connaissance des décisions antérieure représentant le point de départ du délai de récidive et une enquête de personnalité digne de ce nom.
J’ajoute que le traitement intéressant du risque de récidive se passe en prison, la peine doit permettre, au sens de l’article 132-24 du Code pénal (Dans les limites fixées par la loi, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Lorsque la juridiction prononce une peine d'amende, elle détermine son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.
La nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixés de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l'insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions.


En matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28.) de s’assurer de l’absence de récidive.

VP : C’est en prison et devant le Juge de l’application des peines que les moyens doivent être développés.

Policiers et magistrats s’opposent régulièrement. Comment les réconcilier ? On a instrumentalisé une défiance qui ne devrait pas exister. Chacun a une mission bien définie qui doit être respectée : les policiers recherchent les auteurs d’infraction et les interpellent, les magistrats dirigent les enquêtes, examinent les faits et prononcent un jugement.

Faut-il supprimer la rétention de sûreté, qui permet de garder en détention les criminels les plus dangereux après la fin de leur peine ? C’est une loi mal rédigée et sa suppression est un engagement de campagne de Hollande. Mais il faut prendre en charge ces criminels de façon différente : c’est une question qui nécessite une remise à plat des dispositifs de suivi déjà existants.

VP : « Prendre en charge ces criminels de façon différente » les exemples belges et canadiens d’hôpital prison sont intéressants. Il faut en tout état de cause judiciariser au maximum le contentieux de la rétention de sûreté, permettre un vrai débat sur la mise en place, le maintien et l’application de cette mesure. j'y suis favorable sur le principe mais là encore la désorganisation, la précipitation et le manque de moyens ne font pas bon ménage…


Comment garantir une justice plus indépendante ? Ce sujet mérite que l’on prenne le temps de la réflexion. Et je m’inscris pour cela dans la durée. J’ai du temps devant moi. Ce qui est sûr, c’est que je refuserai toute intervention du ministère dans les dossiers individuels. Les informations qui remonteront des tribunaux seront purement techniques, pour nous aider à orienter notre politique pénale. Quant à la réforme du statut pénal du chef de l’Etat, nous sommes déjà en train d’y travailler.

VP : Il faudra réfléchir au statut du parquet d’une part et à la formation des magistrats d’autre part. nous pourrions, sur ce thème de l’indépendance de la justice organiser un comité complet et préparer plusieurs rapports préparatoires à la prise de motions.
Le statut pénal du chef de l’état participe de la séparation des pouvoirs et vient interdire à un juge d’instruction (autorité judiciaire) d’entraver le fonctionnement de l’exécutif. Si réforme il y a lieu elle devra permettre de garantir la séparation des pouvoirs.



Rien de ce qui a été fait par Nicolas Sarkozy ne trouve grâce à vos yeux ? Je ne suis pas dans l’opposition de principe. La réforme de la carte judiciaire était nécessaire, même si elle a été menée sans concertation. J’ai demandé un état des lieux afin de procéder à des ajustements si besoin. Quant aux citoyens assesseurs dans les tribunaux correctionnels, je maintiens l’expérimentation initiale sans l’étendre. Elle ira à son terme et nous procéderons à une évaluation.

VP : Le Décret ou l’Arrêté du 13 juin dernier va dans ce sens, je suis pour ma part favorable à la suppression des citoyens assesseurs en correctionnelle et la réaugmentation du nombre des jurés devant la Cour d’Assises, mais ce n’est semble-t-il pas du tout d’actualité.
De manière plus générale, il semblerait que dans l’attente des réformes législatives annoncées, la chancellerie prenne des circulaires anticipatives, notamment en ce qui concerne les peines plancher afin que les Procureur ne requièrent plus ce type de peines.
Il semblerait aussi que les instructions individuelles du Garde dans les affaires pénales soient prochainement proscrites.
Encore demeure le problème de la Collégialité de l’instruction prévue pour entrer en vigueur le 1er janvier 2014. L’état n’a pas les moyens de mettre en oeuvre cette réforme. Son entrée en vigueur pourrait être repoussée, ou la réforme abrogée…
Enfin, il serait possible qu’un audit de la procédure pénale soit mené sur 2 voire 3 années avant de donner lieu à une réforme pour une fois cohérente...




ACTUALITE DU MOIS DE JUIN 2012

Premier rapport annuel d'activité du Défenseur des droits

Monsieur Dominique Baudis, Défenseur des droits, a rendu son premier rapport annuel. Créée par la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 (JO 30 mars 2011, p. 5497), cette nouvelle institution a fusionné quatre autorités administratives indépendantes : le médiateur de la République, le Défenseur des enfants, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) et la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE).Ce premier rapport rend compte de l'activité menée au cours de l'année 2011 et du premier trimestre 2012.Entre l'année 2010 et l'année 2011, il apparaît globalement une très légère baisse du nombre des réclamations reçues et traitées. Il est plus particulièrement à noter dans ce rapport que :

1. Dans sa mission de prévention et de lutte contre les discriminations

Le principal critère discriminatoire invoqué reste l'origine de la personne, suivi de l'état de santé et du handicap, les difficultés auxquelles se heurtent les femmes (discrimination en raison de leur grossesse, de la situation de famille et du sexe) apparaissant désormais en troisième position.Les réclamations reçues portent majoritairement sur l'emploi, que ce soit l'embauche, le déroulement de carrière ou le licenciement, dans les secteurs privé et public.

2. Dans sa mission de protection des enfantsLe nombre des réclamations relatives à un enfant est en constante augmentation.

La majorité de ces réclamations concerne Paris. La région île de France concentre ainsi 28 % des dossiers, suivie des régions Rhône-Alpes, Languedoc-Roussillon et Aquitaine. Enfin, de nombreuses réclamations émanent des grandes métropoles. 60 % des réclamations sont le fait d'un ou des deux parents, 9 % de l'entourage familial et 8 % des enfants eux-mêmes. Les Jeunes ambassadeurs des droits de l'enfant (JADE) recrutés en mission de service civique, sont chargés de :- Concevoir et mener des actions d'information auprès des enfants et des adolescents sur l'ensemble des droits qui les concernent, en s'appuyant sur la Convention internationale des droits de l'enfant ;- Faire connaître le Défenseur des droits et ses missions. Au nombre de 32 en 2010-2011, ils sont intervenus auprès de 22 789 enfants : dans 140 collèges, 23 structures de loisirs, 23 structures spécialisées et 21 évènements « grand public ».

3. Dans sa mission de veille au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République

Les plaintes à ce sujet sont en augmentation. Elles ont même doublé depuis que le Défenseur des droits a pris la suite de la CNDS.10% des saisines sont relatives à des refus d'enregistrer des plaintes de la part de fonctionnaires de police ou de militaires de gendarmerie. En 2011, les plaintes ont porté pour l'essentiel sur :- le caractère systématique du « menottage » ;- les pratiques abusives, insultes et violences de la part des forces de sécurité (avec ou sans arme) ;- les opportunités et conditions de placement et de non-placement en garde à vue ;- les présentations fallacieuses de faits dans les procès-verbaux ;- les rapports d'incidents absents, erronés ou incomplets. Le Défenseur des droits poursuit sa réflexion sur l'utilité et les modalités d'usage de certaines armes (notamment le lanceur de balle de défense et le pistolet à impulsion électrique). Il a également demandé que la formation et les conditions du renouvellement des habilitations à l'usage du Flash-Ball soient renforcées. Il envisage par ailleurs une recommandation commune avec le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, visant à prévenir l'usage abusif de la fouille intégrale, qui se poursuit malgré l'entrée en vigueur de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 interdisant l'utilisation systématique de la fouille intégrale des personnes détenues. Enfin, il faut noter qu'à la suite de son intervention, il a été rappelé aux fonctionnaires de police que les contrôles d'identité ne devaient pas systématiquement être assortis d'une palpation de sécurité.

Perquisitions et saisies face au secret des sources des journalistes : la CEDH rappelle l'importance de la liberté de la presse dans une société démocratique

Pour la Cour européenne des droits de l'Homme, les perquisitions et saisies effectuées dans les locaux de deux quotidiens français sont des mesures disproportionnées compte tenu de l'intérêt d'assurer et de maintenir la liberté de la presse dans une société démocratique (CEDH, 28 juin 2012, n° 15054/07 et 15066/07, Ressiot et autres c/ France).

Harcèlement Sexuel en devenir :

Le 26 juin 2012, le Sénat a entendu conjointement les ministres de la Justice et des droits des femmes qui ont présenté le projet de loi relatif au harcèlement sexuel (Projet de loi,13 juin 2012, n° 592).

Le projet de loi présenté définit le harcèlement comme «le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des gestes, propos ou tous autres actes à connotation sexuelle soit portant atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant soit créant pour elle un environnement intimidant, hostile ou offensant».

Le projet de loi assortit cette définition de circonstances aggravantes « graduées » : lorsqu’il s’agit d’un acte non répété, mais d’une particulière gravité assimilable à une forme de chantage sexuel, lorsque l’acte est accompli par une personne ayant autorité ou, encore, lorsque la victime est un mineur de moins de quinze ans ou une personne en situation de vulnérabilité.

Agenda de la procédure accélérée : Le Gouvernement a engagé la procédure législative accélérée de manière à ce que la loi puisse être promulguée d’ici à la fin de l’été.

- 27 juin 2012 : examen par la commission des lois sénatoriale du projet et des 7 propositions de loi d’origine sénatoriale portant sur le harcèlement sexuel,

- 28 juin 2012 : conférence des présidents de commissions sénatoriales,

- 11 juillet 2012 : discussion en séance publique du Sénat,

- fin juillet : transmission à l’Assemblée nationale.

À noter   : Dans un arrêt rendu le 12 juin 2012, la cour d’appel de Paris a considéré que, l’abrogation de l’article 222-33 du Code pénal (C. pén., art. 222-33) prenant effet dès la publication de la décision du Conseil constitutionnel, soit à compter du 5 mai 2012, les poursuites diligentées à l’encontre d’un prévenu pour des faits survenus antérieurement n’ont plus de bases légales (CA Paris, pôle 6, ch. 1, 12 juin 2012, n° 11/08551 : JurisData n° 2012-013551 ).


La CJUE revisite la notion de « sanction pénale »

Selon un arrêt rendu par la CJUE, le 5 juin 2012, l'exclusion du bénéfice d'une aide agricole prévue par le droit de l'Union européenne ne constitue pas une sanction pénale.

En l'espèce, un agriculteur polonais avait déposé auprès de l'autorité administrative nationale compétente une déclaration - volontairement inexacte - concernant l'étendue des terres qu'il cultivait. L'autorité administrative en question le sanctionna en lui refusant le bénéfice de l'aide prévue par le droit de l'Union européenne pour les trois années suivant cette fausse déclaration. En outre, l'agriculteur fut condamné pour fraude aux subventions par les juridictions pénales polonaises.

Saisie en cassation, la Cour suprême polonaise posa à la CJUE la question de savoir si les mesures consistant à exclure un agriculteur du bénéfice d'une aide prévue par le droit de l'Union européenne constituaient une sanction pénale. En effet, si tel était le cas, et conformément au principe non bis in idem, la nature pénale de la mesure excluait toute autre action pénale à l'encontre de l'agriculteur fautif pour les mêmes faits.

La CJUE répond, par cet arrêt, en affirmant que les mesures litigieuses ne constituent pas des sanctions de nature
pénale, mais des instruments administratifs spécifiques faisant partie intégrante d'un régime spécifique d'aides européennes et destiné à assurer la bonne gestion financière des fonds publics de l'Union. À noter que, pour poser cette affirmation, la CJUE rappelle sa jurisprudence antérieure (CJUE, 18 nov. 1987, aff. 137/85, Maizena. - CJUE ,27 oct. 1992, C?240/90, Allemagne/Commission. - CJUE, 11 juill. 2002, C?210/00, Käserei Champignon Hofmeister) et fait explicitement référence à la jurisprudence de la CEDH relative à la notion de « procédure pénale ».



Surpopulation carcérale : le contrôleur général des prisons donne son avis

L'ampleur actuelle de la surpopulation carcérale (67000 détenus en permanence pour 57000 places), et le constat « inquiétant » de sa croissance rapide aux cours des derniers mois ont conduit le contrôleur général des lieux de privation de liberté à réagir. Au-delà du constat mathématique, il se livre, dans son avis du 22 mai 2012 relatif au nombre de personnes détenues, à une véritable analyse critique et qualitative des politiques carcérales menées ces dernières décennies.

Trois causes à l'augmentation récente de la population carcérales ont dégagées : la poursuite et le placement en détention pour des infractions qui ne donnaient pas lieu auparavant à un tel traitement (ex. des violences routières) ; le développement des procédures de jugement plus rapides, et, à infractions égales, le constat d'une plus grande sévérité du juge ; et enfin, l'effort fait depuis plus d'un an dans les tribunaux pour procéder plus rapidement à l'exécution effective des (courtes) peines prononcées.

Après avoir dressé le constat d'un véritable échec des politiques carcérales récentes, basées tant sur l'évaluation de la « dangerosité » des personnes condamnées que sur des programmes de construction de nouveaux établissements, le contrôleur général propose une approche globale de la politique carcérale en France fondée notamment sur :

- l'efficacité de la peine: le contrôleur s'interroge sur l'efficacité économique et sociale de l'emprisonnement tel qu'il est aujourd'hui pratiqué : sans remettre en cause la nécessité de la peine, il pose la question de l'adaptation de la forme qu'elle prend à l'infraction commise (ex. de l'efficacité de l'emprisonnement pour vols pour un toxicomane dépendant ?).

- l'accès à la justice des plus modestes: les difficultés à trouver un défenseur génèrent un sentiment d'injustice : « il est impossible de ne pas établir de relations entre ce sentiment et le nombre important de peines prononcées à l'égard de personnes démunies » ;

- la poursuite de la diminution du nombre de détentions provisoires;

-l'instauration d'une véritable politique d'aménagement des peines dans le respect de l'indépendance du juge : recours maîtrisé au placement sous bracelet électronique ; développement des placements extérieurs et du recours à la semi-liberté, sous-utilisés, à l'instar de la suspension de peine pour motif médical mise en place en 2002 ; rénovation du contrôle judiciaire « vieillot », et réflexion autour du travail d'intérêt général.

- est également stigmatisé l'effet dévastateur de l'exécution de courtes peines, avec plusieurs années de retard, sur la réinsertion de certains condamnés : le contrôleur préconise ici l'adoption d'une loi d'amnistie pour les peines inexécutées prononcées antérieurement à 2012, à l'égard d'auteurs de délits condamnés à des peines légères ;

- enfin, le contrôleur suggère qu'une réflexion globale soit menée au sujet des lois d'amnistie dont il s'étonne qu'elles aient disparu « de l'horizon législatif national ».

Source : Avis 22 mai 2012 : JO 13 juin 2012, p. 9962

Vincent PENARD


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