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Communiqué - Captation de son et d'images de vos appareils connectés : l'atteinte de trop à la vie privée et au secret professionnel

Samedi 3 Juin 2023

A la suite des travaux menés dans le cadre des Etats Généraux de la Justice, le Gouvernement déposait le 3 mai 2023 dernier au Sénat le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, engageant ainsi une procédure accélérée.
 
Outre les diverses mesures attentatoires aux libertés individuelles telles que les perquisitions de nuit, la consultation médicale ou l’assistance d’un interprète en visioconférence durant les mesures de garde-à-vue, ou encore l’extension des pouvoirs du ministère public, les 35e et 60e de l’article 3 du projet créent les articles 230-34-1 et 706-96-2, desquels il ressort que :
 
  • en matière de crime ou de délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement, le Juge des libertés et de la détention (à la requête du Procureur) ou le Juge d’instruction peut autoriser ou ordonner l’activation à distance d’un appareil électronique aux fins de localisation (cette interception ne pouvant concerner la ligne d'un député, d'un sénateur, d’un avocat ou d’un magistrat) ;
 
  • en matière de criminalité et délinquance organisées, le Juge des libertés et de la détention (à la requête du Procureur) ou le Juge d’instruction peut activer à distance un appareil électronique aux fins de captation, fixation, transmission et enregistrement de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ou l'image des personnes se trouvant dans un lieu privé (cette activation ne pouvant concerner la ligne d'un député, d'un sénateur, d’un avocat ou d’un magistrat).
 
Si le texte prohibe la transcription des conversations écoutées lorsque le téléphone du justiciable se trouve dans le cabinet ou le domicile de l’avocat, rien n’interdit en revanche aux services d’enquêtes de localiser le justiciable alors qu’il se trouve avec son avocat et de prendre connaissance de conversations relatives à la défense des personnes suspectées. 
 
La FNUJA rappelle que le secret professionnel de l’avocat protège les libertés individuelles, et assure le respect de la confidence et de la confiance du justiciable.  Il constitue une garantie fondamentale pour le citoyen, protégeant son droit de disposer, en toute matière, d’un défenseur libre, éclairé́ et indépendant.
 
Comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel, ce lien de confiance est fondé sur l’intérêt général, il est nécessaire au bon fonctionnement de toute société démocratique dans le cadre d'un État de droit. Ce secret est d’ordre public et revêt, dès lors, un caractère ABSOLU. Il ne peut ainsi être mis en balance que face à d’autres nécessitées impérieuses d’intérêt général.[1]
 
La FNUJA ne cesse de dénoncer les atteintes graves et répétées portées au secret professionnel de l’avocat et s’insurge une fois encore contre ces mesures gravement attentatoires aux droits de la défense.
 
Par ailleurs, la FNUJA déplore l’atteinte dangereuse portée au droit à la vie privée et à l’intimité protégeant les justiciables en ce que les écoutes téléphoniques, la localisation et la captation d’image réalisées interviendraient de manière arbitraire ou injustifiée via divers appareils connectés,  et s’inquiète de potentielles dérives dans la collecte d’informations à caractère privé, dans le seul but de satisfaire des objectifs de politique pénale en l’absence de contrôle a posteriori réel et effectif des données écoutées, visionnées ou collectées. 
 
En conséquence, la FNUJA s’oppose à l’adoption de telles mesures et exhorte les parlementaires à s’y opposer fermement et le gouvernement à les retirer.
 

[1] Conseil constitutionnel, décision ° 2015-506 QPC du 4 décembre 2015
 


Axel Calvet