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En pleine crise économique, qui se préoccupe des collaborateurs libéraux ?

Lundi 27 Avril 2009

Depuis huit mois maintenant les cabinets d’avocats sont frappés par la crise qui affecte l’économie mondiale et en particulier les activités liées au secteur bancaire, dont l’immobilier et les fusions acquisitions. Depuis quelques semaines se développe une vague de dégraissage dans les gros cabinets d’affaires et en particulier au sein des filiales françaises de cabinets anglo-saxons.


En pleine crise économique, qui se préoccupe des collaborateurs libéraux ?
Depuis l’éclatement de la bulle internet au début des années 2000 et la crise qui s’en suivit dans les cabinets d’affaires, nous n’avons eu de cesse de dénoncer le modèle économique de ces cabinets, en grande partie fondé sur une énorme escroquerie que l’Ordre de Paris et les bâtonniers successifs se sont bien gardés de sanctionner : il s’agit du modèle économique du « faux contrat de collaboration ». Pour mémoire, il s’agit pour des cabinets de :
- recruter des collaborateurs libéraux, afin de bénéficier de ce régime fiscal et social avantageux et de la souplesse qu’il confère dans la gestion de la masse salariale,
- d’employer ces collaborateurs comme des salariés, sans leur laisser la possibilité de développer de clientèle personnelle réelle et avec des conditions d’exercice de salariés, caractérisées notamment par le fait de leur imposer un nombre important d’heures facturables.

Outre le fait que cette violation de la distinction légale entre collaboration libérale et salariat engendre une distorsion de concurrence au détriment des cabinets qui respectent la collaboration libérale, elle a pour principale conséquence de priver ces faux collaborateurs libéraux de la protection liée au salariat à laquelle leurs conditions d’exercice les prédisposent pourtant. En période de crise économique, cela signifie notamment, qu’aucun motif n’est requis pour se séparer d’un collaborateur, et que celui-ci ne bénéficie d’aucune aide ni indemnisation au titre de ce « licenciement ».

Ce risque est aggravé par le développement de la nouvelle ARPPI qui constitue désormais la structure dominante pour les filiales des cabinets anglais et américains. Si nous nous sommes réjouis de l’arrivée de cette structure inspirée de la LLP anglo-saxonne dans la palette déjà fournie des structures d’exercice françaises, nous n’avions pas mesuré le risque qu’elle représenterait pour les collaborateurs de ces filiales françaises en cas de crise économique. En effet, les collaborateurs de ces cabinets ne bénéficient désormais plus de la garantie financière des maisons mères anglo-saxonnes et en cas de faillite ou dépôt de bilan se retrouvent pleinement exposés à un risque de non-recouvrement de leurs créances. Or, aujourd’hui qui peut sérieusement prétendre que ce risque de dépôt de bilan n’est que théorique ?!

Il est désormais urgent que le Conseil national des Barreaux négocie avec les pouvoirs publics une disposition visant à conférer aux créances des collaborateurs d’un cabinet en difficulté le rang de créances privilégiées.

Plus généralement, il est encore temps pour le Conseil national des Barreaux de voter en urgence une modification de l’article 14 du Règlement intérieur national pour augmenter les délais de prévenance, afin de laisser le temps au collaborateur remercié de développer une clientèle ou à tout le moins de négocier son départ dans des conditions satisfaisantes pour lui. Le rapport de la Commission Darrois, reprenant la proposition qui lui a été présentée par la FNUJA a recommandé l’augmentation des délais de prévenance jusqu’à un an, en fonction de la durée de présence du collaborateur dans le cabinet. J’ai cru comprendre que cette proposition regroupait un large consensus au sein de la profession. Il n’est dès lors point besoin d’attendre davantage pour la mettre en œuvre.

Comme dans les années 2000, nous appelons également les collaborateurs à initier des recours en requalification de leur contrat de collaboration en contrat de travail, afin de pouvoir obtenir la protection liée à ce statut.

Nous appelons également les ordres et en particulier, celui de Paris, à s’auto saisir puisqu’au titre des textes qui réglementent la profession ils sont notamment en charge du contrôle des conditions d’exercice de la collaboration et ont le pouvoir de prononcer des sanctions contre les cabinets qui contreviennent à ce statut.

Mais la requalification n’est pas la seule manière d’assurer la protection des centaines de collaborateurs au chômage ou en passe de l’être dans les prochaines semaines. Il est peut être encore temps pour eux ou leurs cabinets de souscrire des assurances « pertes d’activité » comme peut le faire n’importe quel dirigeant. En tout état de cause, il est encore temps pour les cabinets concernés de constituer un fonds de solidarité pour venir au secours de ceux qui se retrouvent sans ressources avec une famille à assumer et des crédits à rembourser.

Nous appelons les pouvoirs publics, ainsi que toutes les forces vives du Barreau de France à se mobiliser pour sauver ce qui peut l’être encore, à savoir la dignité de notre profession et celle de milliers de collaborateurs menacés.

Fédération Nationale des Unions de Jeunes Avocats