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Gouvernance : Lettre Ouverte du Président de la FNUJA au Président du CNB

Mercredi 21 Mars 2012

Lille, le 20 mars 2012

Lettre Ouverte à

Monsieur le Président du CNB
Monsieur le Bâtonnier
Christian CHARRIERE-BOURNAZEL


Gouvernance : Lettre Ouverte du Président de la FNUJA au Président du CNB


Monsieur le Président,

Lors de votre brillante élection à la Présidence du Conseil National des Barreaux, vous avez émis, sur les sujets politiques agitant notre profession, une seule annonce : votre opposition à l'élection au suffrage universel direct du Président du CNB.

Si la FNUJA ne partage pas votre position, vous conviendrez que si la vôtre à titre personnel était attendue, c'est bel et bien parce que ce sujet est au cœur du débat sur la modernisation et la représentativité de nos institutions.

Pour autant, à la lecture de l'Ordre du jour de la prochaine assemblée qui nous a été communiqué hier, le sujet de "la gouvernance" semble une nouvelle fois écarté du débat.

Or, sur ce sujet, le constat est dressé ; il est amer.

Le CNB apparaît trop éloigné, son fonctionnement est ignoré, son travail n'est pas compris, au pire méprisé.

Ce constat est en grande partie injuste tant il est vrai qu'en y regardant bien, le CNB a acquis par la détermination de ses membres ses lettres de noblesse.

Il est parvenu ainsi peu à peu à, ce qui était une gageure, unifier la réglementation de notre profession et devenir l'institution incontournable rassemblant en son sein toutes les forces qui la composent.

Néanmoins, beaucoup trop d'avocats ne se sentent pas représentés, il suffit pour s'en convaincre de se reporter au taux d'abstention des élections de décembre 2011, plus de 67 % sur la circonscription Paris, et 56 % sur la circonscription dite nationale et ce sans même aborder les problèmes de Barreaux qui n'ont pas jugé utile d'organiser le vote.

Le CNB s'est interrogé sous la mandature précédente à travers le rapport de Mr FAUGERE, sur sa propre réforme vers un Ordre national ou encore celle d'une régionalisation structurelle du CNB créant ainsi une strate politique supplémentaire éloignant un peu plus l'avocat du pouvoir décisionnel.

Du point de vue des jeunes avocats, ce chemin là mène à une impasse.

Je me permets de vous rappeler que la FNUJA a toujours lutté pour que la profession s'exprime d'une seule voix, condition sine qua non de l'avènement d'une parole qui compte et qui ait des chances d'être entendue.

Elle a milité pour la création d'une institution unique rassemblant Paris, la Province, les syndicats et les Ordres.

C'est animés par cette même volonté que les jeunes avocats appellent les élus de la profession à s'emparer d'une ambition simple, déjà ancienne, mais tellement révolutionnaire en cette année 2012 : la démocratisation de nos institutions.

Il est en effet constant que pour les 3 prochaines années encore sur les 82 membres qui composent l'assemblée du CNB, seuls 40 d'entre eux sont élus au suffrage universel direct.

Mieux, son Président en charge de représenter plus de 50 000 avocats n'a été élu que par ces 82 membres.

Cette réalité nourrit le fantasme de la confiscation réelle ou supposée du pouvoir par quelques uns.

Les jeunes avocats ne s'accommodent pas de la cooptation et n'ont qu'un seul souci, celui d'une institution forte avec une représentation forte.

Ils ont invité ainsi lors de la campagne, le CNB à se rapprocher de ses mandants et à offrir à chaque avocat trois voix : une pour le collège général, une pour le collège ordinal, et une pour le Président du CNB.

Outre ce gain en proximité, l'élection du Président du CNB au suffrage universel offre à l'institution une triple légitimité :

Tout d'abord, celle à l'égard des Confrères qui depuis 200 ans ont l'habitude de se mobiliser pour élire leurs représentants au sein des barreaux et qui pourront investir celui ou celle qui aura la charge nationale de les représenter tous, de les défendre tous.

A l'égard des pouvoir publics, le Président du CNB n'aura plus à justifier de sa légitimité issue d'un vote annuel par une assemblée générale de 80 membres, au fonctionnement obscur, et pourra, sans risque d'être démenti, tout simplement déclarer qu'il représente les 50 000 avocats de France.

Enfin, à l'égard du Bâtonnier de Paris et du Président de la Conférence des Bâtonniers, qui tiennent leur légitimité pour l'un d'un peu moins de la moitié des avocats composant notre profession, et pour l'autre de l'ensemble des Bâtonniers de Province , l'élection du Président du CNB au suffrage universel parachève la réforme initiée par la FNUJA qui a vu ces deux hautes personnalités devenir membres de droit du Bureau du CNB mettant ainsi fin au GIE ridicule et inefficient de la profession.

Ce n'est que dans ce contexte d'un Président élu au suffrage universel de 50 000 avocats que le Bâtonnier de Paris et le Président de la Conférence des Bâtonniers pourront investir toute leur place, et rien que leur place.

Les Jeunes Avocats entendent bien évidement les prétendants du statu quo, ou les tenants d'une administration de la profession, s'élever pour contester le coût d'une telle mesure ou encore son danger démocratique, comme si nos Confrères étaient assez sots pour élire l'incapable.

La FNUJA est assurément favorable à ce que la future campagne à la Présidence du CNB soit encadrée.

Faudra-t-il limiter l'éligibilité des candidats à d'anciens Bâtonniers ou membres du Conseil de l'Ordre ou du CNB ? Probablement ; devra-t-on inscrire la règle, pour l'instant non écrite, d'une alternance entre Paris et la Province ? Nous le croyons ; devrons-nous réfléchir à une limitation, et à un contrôle des comptes de campagnes pour permettre un débat loyal et accessible à tous ? Certainement ; faudra-t-il élire le Président du CNB lors de la convention nationale par bulletins papier et/ou électroniques ? Nous l'envisageons.

Toutes ces modalités peuvent être ardemment discutées mais le principe demeure. Il faut rompre avec le temps des campagnes de petits fours à destination de quelques électeurs pour ouvrir le champ du débat à l'ensemble des avocats.

Il doit être permis à chaque candidat à la Présidence du CNB de s'adresser aux 50 000 avocats et de se nourrir de leur quotidien.

Il doit être offert à chaque avocat le droit de s'emparer des problèmes de la profession pour se choisir, sur la base d'un programme transparent et élaboré de tous, un avenir.

C'est pourquoi, conformément à ses engagements pendant la campagne aux élections du CNB, et parce que le temps politique nous permet aujourd'hui dans l'attente d'une nouvelle législature de réfléchir sur notre propre organisation, je vous remercie de bien vouloir porter à l'ordre du jour de la prochaine assemblée du CNB ou à celle du 20 avril les questions suivantes :

• L'assemblée générale est-elle favorable à l'élection du Président du CNB au suffrage universel selon des modalités à définir ?
• L'assemblée générale est-elle favorable à l'élection au suffrage universel direct des membres du collège ordinal selon des modalités restant à définir ?


Je vous remercie par ailleurs de bien vouloir m'inviter "es qualité" à prendre la parole au sein de votre assemblée afin de présenter au nom de la FNUJA la présente proposition.

Monsieur le Président, ne vous méprenez pas : les jeunes avocats souhaitent simplement passer d'un Président du CNB connu et apprécié de quelques uns, à un Président connu et reconnu de tous.

Je vous remercie par avance de l'accueil que vous ferez à la présente et des suites que vous voudrez bien lui donner.

J'en adresse copie à l'ensemble des membres du CNB et en opère la plus large diffusion.

Je vous prie de croire, Monsieur le Président, Mon Cher Confrère, en l'expression de mes sentiments dévoués.


Stéphane DHONTE
Président de la FNUJA