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Interview de la Présidente de la FNUJA - Wolters Kluwer France : Actualités du droit

Samedi 9 Juin 2018

Propos recueillis par Stéphanie Pourtau


Interview de la Présidente de la FNUJA - Wolters Kluwer France : Actualités du droit
À l’issue du 75e congrès de la Fédération nationale des Unions de jeunes avocats (FNUJA), réuni à Bayonne du 9 au 13 mai 2018, Aminata Niakate, première vice-présidente de l’institution depuis 2017, a été élue à sa tête. Elle nous livre ses projets.


Actualités du droit : Quelles seront vos actions prioritaires pendant votre année de mandat ?
 
Aminata Niakate : Avec Jean-Baptiste Blanc, élu premier vice-président à mes côtés, nous souhaitons avant tout être au service des Unions de jeunes avocats (UJA) adhérentes de notre fédération et que cette dernière soit le porte-parole de leurs propositions.
 
Nos actions seront principalement guidées par les motions adoptées lors de notre dernier congrès, qui s’est tenu du 9 au 13 mai à Bayonne. Nous y avons notamment pris position sur la libre communication des avocats et sommes favorables à la mention sur tout support (site internet, plaque, vitrine ou carte de visite, etc.) des domaines d’activité pratiquée par nos confrères, tant que cette information est loyale et sincère et qu’il n’est pas créé de confusion avec la spécialisation.
 
Nous souhaitons que nos institutions représentatives prennent des mesures efficientes pour parvenir à l’égalité réelle au sein de la profession. Mon mandat sera d’ailleurs dédié à la promotion de l’égalité au sein de la profession, ainsi qu’à la défense des libertés et droits fondamentaux, au numérique et à l’international.
 
Nous exhortons également la direction de la Caisse nationale des barreaux français (CNBF) à une gestion responsable de notre Caisse, particulièrement dans un contexte où son existence même est menacée.
 
Enfin, nous serons naturellement attentifs à la situation des collaborateurs, en particulier avec Anne-Lise Lebreton, présidente de la commission Collaboration du Conseil national des barreaux (CNB) et présidente d’honneur de la FNUJA.
 
ADD : Envisagez-vous des actions précises à la suite de la présentation, le 2 mai dernier, des résultats de l’enquête du Défenseur des droits sur les discriminations au sein de la profession d’avocat ?
 
A. N. : La FNUJA qui a participé à l’élaboration de cette enquête, a, lors de son congrès de Bayonne, adopté une motion « Égalité » traçant des pistes qui se veulent ambitieuses, pour parvenir à l’égalité réelle et lutter contre les discriminations dans la profession.
 
Par cette motion, nous invitons chaque avocat et avocate à ne pas nier la réalité des discriminations mise à jour par l’enquête et à faire preuve d’exemplarité en matière d’égalité et de lutte contre les discriminations.
 
Nous saluons les engagements d’ores et déjà pris par le CNB, la Conférence des bâtonniers et le barreau de Paris, lors de la conférence de presse du 2 mai 2018, de mettre en place des mesures tendant à faire cesser les comportements discriminatoires au sein de la profession.
 
Nous attendons du CNB qu’il intègre le principe d’égalité dans le Règlement intérieur national (RIN), afin que ce principe constitutionnel fasse indiscutablement partie intégrante de notre socle de déontologie. Nous demandons également au CNB, ainsi qu’aux ordres, de lancer des campagnes de sensibilisation à l’égalité et à la lutte contre toutes les discriminations et de mettre en place des formations dédiées à ces problématiques, tant dans le cadre de la formation initiale que de la formation continue.
 
Nous souhaitons en outre que les instances disciplinaires prononcent des sanctions réelles et effectives en présence de toute violation avérée du principe d’égalité et de fassent usage de l’article 184 du décret de 1991 qui dispose que « L'instance disciplinaire peut en outre, à titre de sanction accessoire, ordonner la publicité de toute peine disciplinaire ». Nous demandons au CNB et aux ordres de publier de ces sanctions.
 
Nous envisageons enfin de sensibiliser et de former directement à l’égalité nos confrères, en mettant en place une « caravane de l’égalité », sur le modèle de notre formation itinérante de 8 heures qui existe déjà pour l'installation et l’association, la médiation et le numérique. Nous espérons pouvoir dispenser la première formation à l’automne 2018.
 
ADD : Quelle position les jeunes avocats doivent-ils selon vous adopter face aux legalthech ?
 
A. N. : Si les legaltech occupent de plus en plus d’espace aujourd’hui dans le marché du droit, c’est essentiellement parce que nous, les avocats, n’y sommes pas assez présents. Plutôt que d’adopter, souvent à juste titre, une posture défensive contre certains "braconniers du droit", les jeunes avocats doivent être audacieux et créer leurs propres legaltech respectueuses de nos principes déontologiques, pour apporter aux justiciables une offre adaptée à un besoin en droit croissant.
 
La FNUJA a d’ailleurs proposé que les règles relatives aux incompatibilités et aux structures d’exercice de la profession d’avocat évoluent pour que les avocats puissent développer et exploiter de nouveaux services en ligne, sans devoir renoncer à l’exercice de leur profession.
 
Nous estimons également opportun de donner les moyens aux avocats de réaliser les investissements utiles à leur développement et à l’amélioration de leur compétitivité en la matière, notamment via l’ouverture du capital des structures d’exercice d’avocats aux tiers, toujours dans le respect de nos principes déontologiques.
 
La commission Numérique de la FNUJA a mis en place une caravane du numérique l’an dernier et sa commission Installation et Association, sous la direction de Catherine Modat, notre vice-présidente, vient d’éditer son nouveau guide de l’installation et de l’association, ce qui nous permet d’accompagner au mieux nos confrères qui souhaitent se lancer.
 
Nos élus au CNB, Thomas Charat, président de la commission Droit et Entreprise, et Sandrine Vara, présidente de la commission Numérique, sont également à pied d’œuvre pour accompagner les entrepreneurs que sont les avocats.
 
ADD : La FNUJA a été très active ces dernières semaines lors de la mobilisation contre le projet de loi de programmation de la justice. Prévoyez-vous des actions dans les semaines à venir ? Quels points défendrez-vous en particulier ?
 
A. N. : La FNUJA reste mobilisée contre un certain nombre de ses dispositions. Nous venons, par exemple, de prendre, le 2 juin dernier, une motion contre les dispositions sur le Tribunal criminel départemental.
 
Nous restons vigilants aux propositions qui seront faites en matière de spécialisation des juridictions et nous nous y opposerons fermement si elles tendent à vider de leur substance contentieuse les juridictions, pour mieux pouvoir les fermer dans un second temps, quand à force de spécialisation certaines d’entre elles n’auront plus d’activité. Nous refuserons le sacrifice du service public de la justice sur l’autel de considérations purement budgétaires.
 
Nous sommes toujours engagés dans le mouvement intersyndical avec des syndicats représentatifs de magistrats et de fonctionnaires de greffe, via lequel nous allons écrire à la ministre de la Justice pour exiger les projets de décrets ainsi qu’un calendrier. Nous ne souhaitons pas qu’ils soient rédigés en catimini, ni être mis devant le fait accompli !
 
ADD : Vous êtes également présidente de la commission Égalité au sein du Conseil national des barreaux. Quels projets comptez-vous porter au sein de cette institution ?
 
A. N. : La commission Égalité du CNB a vocation à faire des propositions pour parvenir à l’égalité réelle et à lutter contre les discriminations, tant dans la profession que dans la société. En la matière, je souhaite porter au CNB les propositions de la FNUJA évoquées ci-dessus.
 
Nous avons créé au CNB un groupe de travail chargé de proposer un plan d’action pour lutter concrètement contre le harcèlement et les discriminations au sein des cabinets, notamment avec Anne-Lise Lebreton, pour la commission Collaboration, Valérie Duez-Ruff, membre de la commission Égalité qui s’occupait de la commission Harcèlement et Discrimination de l’Ordre des avocats de Paris, Béatrice Voss pour la commission Libertés et Droits de l’Homme et Dominique de Ginestet pour la commission Règles et Usages.
 
Je souhaite également poursuivre le travail initié par ma prédécesseure, Clothilde Lepetit et promouvoir la Charte responsabilité sociétale des cabinets d’avocats (RSCA), instrument d’autodiagnostic, dont tous les cabinets d’avocats doivent s’emparer. Mon objectif est de valoriser les avocats signataires de la charte, nous faisant un retour sur les diagnostics réalisés et proposant des solutions pour parvenir à l’égalité.
 
Au sein de la commission Égalité, nous réfléchissons à formuler des propositions pour parvenir à l’égalité en matière de rémunération et d’accès à l’association. Nous souhaitons également travailler sur d’autres discriminations et projetons de lancer un grenelle du handicap le 3 décembre prochain.
 
Nous attendons aussi du CNB qu’il s’exprime sur la question du contrôle d’identité au faciès. Enfin, nous avons été auditionné par la députée Marie-Pierre Rixain sur le congé maternité et nous voulons relancer le débat sur le congé paternité.
 
Nous avons donc beaucoup de travail devant nous !

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