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MOTION DROIT PUBLIC / AFFAIRES PUBLIQUES « HALTE AUX ATTEINTES AU PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE EN PROCÉDURE ADMINISTRATIVE »



 
La FNUJA, réunie en Congrès en Guadeloupe du 16 au 19 mai 2023 :
 
VU :
  • la motion du Congrès de la FNUJA réunie à Strasbourg du 26 au 28 mai 2022,
  • les articles 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 
  • l’arrêt du 5 avril 2018 de la Cour européenne des droits de l’homme, Zubac c/ Croatie, n° 40160/12,
  • les dispositions du code de justice administrative, en particulier ses articles L522-3, R222-1, R625-1, R625-2 et R711-3 ;
 
RAPPELLE que le principe du contradictoire est un corollaire du principe des droits de la défense et que le droit au recours effectif est une composante essentielle d’une société démocratique ;
 
RAPPELLE que, selon la Cour européenne des droits de l’homme, le droit d’accès à un tribunal se trouve atteint dans sa substance lorsque la réglementation cesse de servir les buts tant de la sécurité juridique que de la bonne administration de la justice et qu’elle « constitue une sorte de barrière qui empêche le justiciable de voir son litige tranché au fond par la juridiction compétente » (arrêt du 5 avril 2018 précité) ;
 
  1. SUR LES ORDONNANCES DE TRI 
 
CONSTATE le recours croissant aux ordonnances de « tri » rendues par les juridictions administratives sur le fondement de l’article L. 522-3 ou de l’article R. 222-1 du code de justice administrative ;
 
S’ALARME de la systématisation d’une justice expéditive, rendue sans procédure contradictoire, sans audience, sans motivation, et de manière non-collégiale éloignant le justiciable des juridictions dans un souci de gestion des stocks ;
 
DEPLORE une utilisation dévoyée et arbitraire du mécanisme de l’ordonnance de tri ayant pour conséquence de restreindre considérablement l’accès des justiciables aux juges administratifs ;
 
SOLLICITE qu’apparaisse explicitement au sein des rapports d’activités des juridictions administratives le nombre d’ordonnances de tri rendues ;
 
EXIGE SANS DELAI que le recours aux ordonnances de tri s’exerce dans le strict respect du principe du contradictoire, impliquant : 
 
D’UNE PART, la suppression de la possibilité de rejeter une requête par ordonnance de tri en raison de son prétendu caractère mal fondé ;
 
D’AUTRE PART,
 
  • La possibilité, pour le requérant, de présenter ses observations ou régulariser son recours, dans un délai fixé par le juge, après que celui-ci lui ait indiqué, de façon motivée, qu’il entendait rejeter son recours par ordonnance de tri ;
 
  • La possibilité de pouvoir interjeter appel de toute ordonnance de tri, qu’elle soit prise par les juges du fond, Tribunal et Cour administrative d’appel, ou par le juge des référés dans le respect du double degré de juridiction ;
 
  1. SUR LES PROCEDURES ORALES D’INSTRUCTION 
 
SALUE l’avancée initiée par le décret n° 2023-10 du 9 janvier 2023 permettant de convoquer les parties à une procédure orale d’instruction (articles R625-1 et 2 du code de justice administrative) ;
 
INVITE les avocats à se saisir de ces dispositions en demandant la tenue de séances ou d’audiences d’instruction auprès du magistrat instructeur ;
 
SOLLICITE l’adaptation de la plateforme Télérecours permettant de formuler une demande en ce sens ;
 
APPELLE les magistrats instructeurs, lorsqu’ils décident de ne pas y faire droit, à en informer la partie qui a formulé la demande ;
 
  1. SUR LES DELAIS LAISSES AUX PARTIES DANS LE CADRE DE L’INSTRUCTION
 
CONSIDERE que les mécanismes permettant de clôturer l’instruction à tout moment après avoir adressé de nouvelles écritures aux parties portent atteinte au principe du contradictoire ;
 
CONSTATE que les délais laissés par le juge afin de répondre aux demandes de pièces ou éléments complémentaires en cours ou après clôture d’instruction sont de plus en plus contraints portant atteinte à l’exercice des droits de la défense ;
 
INVITE les pouvoirs publics à règlementer les délais laissés aux parties pour répondre à ces demandes afin qu’elles disposent d’un délai raisonnable pour ce faire ;
 
  1. SUR LA MOTIVATION DU SENS DES CONCLUSIONS DU RAPPORTEUR PUBLIC
 
REGRETTE que le rapporteur public ne soit pas tenu de préciser les motifs sur lesquels il entend se fonder pour proposer une solution à la formation de jugement ;
 
CONSIDÈRE que ces motifs sont indispensables pour préparer de manière utile la plaidoirie et défendre ainsi au mieux les intérêts du justiciable ;
 
APPELLE à ce que les motifs retenus par le rapporteur public pour adopter une décision figurent dans les éléments devant être communiqués aux parties en vertu de l’article R. 711‑3 du code de justice administrative. 
 
Vendredi 19 Mai 2023
Axel Calvet